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Nanette Maupertuis : « Les Corses croient au projet politique d’une autonomie de plein droit et de plein exercice »


Nicole Mari le Jeudi 30 Septembre 2021 à 20:46

C’est par un hommage à Marie-Christine Bernard-Gelabert, la Directrice générale des services de la Collectivité de Corse, brutalement décédée, que la présidente de l’Assemblée de Corse, Nanette Maupertuis, a ouvert cette session de rentrée. Avant d’aborder des points plus politiques et revenir sur l’actualité immédiate, notamment la surfréquentation touristique et la pression accrue sur certains sites naturels, l’affaire de la Corsica Ferries, mais aussi la demande d’autonomie. Elue au Comité européen des régions, elle a également insisté sur l’importance de participer à la Conférence sur l’Avenir de l’Europe lancée par la Commission européenne.



Nanette Maupertuis  - Photo Michel Luccioni
Nanette Maupertuis - Photo Michel Luccioni
Voici le texte de son discours :

 « Apru oghje sta sessione incù un’emuzzione tamanta è una tristezza sincere.
In a notte di u 4 à u 5 di sittembre scorsu, Marie-Christine Bernard-Gelabert, a Direttrice Generale di i Servizii di a Culletività s’hè spenta.
U nostru stunamentu, a nostra pena, in fronte à sta nutizia, sò stati tamanti è ancu oghje, hè difficiule di rializà chì ùn travagliaremu più cùn ella.
A sò quantu u Cunsigliu esecutivu, l’eletti, u persunale di a culletività è tutti quelli chì anu tavagliatu à fiancu à ella, a stimavanu, a prezavanu è sò tocchi da a so sparizzione.
Ghjera una persona brava, amena è una funziunaria di gran valore, sempre pronta - notte è ghjornu - à impignà si pà a Cullettività mà sopratuttu pà a Corsica è i Corsi.
Di a Corsica era una figliola, ella chì hà dattu tantu energia, tantu corre à u serviziu di stu paese. Di què, a sucetà corsa ùn si ne scurderà.
Pour ma part, je n’oublierai pas ce sourire que ni le travail, ni la maladie n’ont réussi à ternir. Un sourire qui traduisait une forme d’allégresse quotidienne que je qualifierai de « pudiquement contenue ».
Je voudrais dire aussi au Président de l’exécutif et à son administration, à tous les collaborateurs directs de notre DGS que l’Assemblée de Corse et l’Assemblea di a Giuventù sont avec eux.
Nos pensées et notre affection se tournent vers sa famille et ses proches et je voudrais leur redire au nom de l’assemblée de Corse que nous sommes avec eux.
Et j’aimerais, en la mémoire de Madame Marie-Christine Bernard-Gelabert vous inviter à observer une minute de silence.
Vi ringraziu.

Il y a quelques semaines, nous a aussi quitté Léo MICHELI, chef de la résistance Corse et je souhaite ici, lui rendre hommage. Son combat pour la liberté et son engagement ont fait l’histoire et demeureront dans la mémoire collective.
Malurosamente u malanu hà pichjatu altre ghjente, cuì indè a nostra cullettività. Madame Joelle Nivaggioli a perdu son fils Antoine âgé de 17 ans à peine. Madame Rosa Santoni notre sténotypiste a perdu sa maman.
Nous leur disons à elles aussi et à leur famille notre amitié et notre soutien.

Une surfréquentation touristique
Ces mois d’été ont été marqués par une forte fréquentation touristique, cela a été rappelé tout à l’heure après deux années difficiles dans le secteur. S’il est naturel de se réjouir de cette reprise, sans que les pertes économiques et sociales de 2020 aient été complètement recouvrées, force est de constater que la croissance des flux a été fortement concentrée dans l’espace et dans le temps et a entrainé, des congestions du réseau routier, une surexploitation des ressources en eau et en électricité nécessitant des coupures intermittentes, ainsi qu’une pression accrue sur certains sites naturels.
Il nous faudra collectivement trouver des solutions à ce défi qui consiste à recevoir des touristes tout en ne dépassant pas nos capacités de charge écologique, sociale et infrastructurelle. Je ne doute pas un instant des capacités de l’Agence du Tourisme de la Corse et de l’Office de l’Environnement, mais aussi de toutes les parties prenantes pour opérationnaliser de manière effective la transition écologique du tourisme corse qui a été décidée au sein de ce même hémicycle.

Des élections...
La torpeur estivale a été perturbée par l’agitation politique qui a entouré les élections au Syndicat Départemental d'Energie de la Corse du Sud. Permettez que je félicite Jean Biancucci, élu président du SDE. Il est absent aujourd’hui, mais nous lui souhaitons un retour rapide dans l’hémicycle. Je félicite pareillement tous les présidents élus ces dernières séances dans tous les organismes satellites de la CDC. Ils ont des missions très importantes pour le collectif.
J’en profite pour rappeler que Romain Colonna a été élu à la Présidence de la SITEC. Notre île, peut-être davantage que d’autres territoires, a besoin de solutions spécifiques en termes de réseaux, de communications et d’hébergement de données. La Corse doit se donner les moyens de soutenir et faciliter par une véritable transition numérique et une plus grande autonomie en la matière. Si ce besoin d’autonomie vaut pour la gestion de l’énergie et du numérique, il vaut aussi dans de nombreux autres domaines.

Un projet politique
Depuis 6 années, les Corses sont de plus en plus nombreux à voter pour un projet politique axé sur une autonomie de plein droit et de plein exercice, et ce, élection après élection. Malgré les fins de non-recevoir que nous adressent l’Etat et le gouvernement, les Corses croient au potentiel de cette autonomie. Et d’ailleurs, nos homologues des autres régions métropolitaines, reconnaissent tous la légitimité totale de notre demande d’un statut d’autonomie de plein droit et de plein exercice. C’est pour poursuivre cet objectif que Monsieur le Président de l’exécutif a mandaté la Professeure de droit public, Madame Wanda Mastor afin de produire une analyse diagnostique sur le fonctionnement de nos institutions et prospective sur leur évolution possible. Tous les groupes sont associés à cette démarche et au-delà d’autres composantes de la vie politique insulaire et il faut s’en féliciter. 

Une convention européenne
Dans l’attente d’un signe d’ouverture de l’Etat dans ce domaine, il nous faut nous saisir de chaque outil qui s’offre à nous. Je pense par exemple à la Conférence sur l’Avenir de l’Europe débutée en mai dernier et qui court jusqu’en avril 2022, j’ai l’honneur d’y participer en tant que membre du comité des régions d’Europe. Sa déclinaison corse a été initiée par Madame la Ministre, Elisabeth Moreno, vendredi dernier à Lucciana, nous y étions présents avec le député Castellani, mais aussi par l’Alliance libre européenne qui a tenu la semaine dernière un séminaire dédié à cet effet à Bastia. La plateforme en ligne ouverte par la Commission européenne permet de recueillir les vœux, les idées et projets des Européens pour construire ensemble l’Europe de demain. Pour ce qui nous concerne une Europe des peuples, une Europe solidaire, une Europe où les processus d’autodétermination sont possibles. Et je compte aussi sur l’Assemblea di a Giuventù, dont la mandature sera renouvelée en cette fin d‘année pour participer à cette grande consultation européenne.

Une mauvaise nouvelle

Enfin, permettez que je revienne un instant sur une très mauvaise nouvelle pour la Collectivité de Corse. Nous l’avons apprise hier en fin d’après-midi : notre institution semble définitivement condamnée à payer 86 millions d’euros à la compagnie Corsica Ferries qui s’était plainte de l’attribution de la DSP 2007- 2013. Au-delà du préjudice économique pour notre institution, si cette dernière décision du conseil d’Etat était rendue exécutoire, mais aussi pour la Corse qui a déjà subi les pertes inhérentes à la crise COVID-19, nous subirions, une fois de plus, les conséquences désastreuses de la gestion passée des affaires publiques de la Corse par nos prédécesseurs. En cela me semble-t-il, cette affaire revêt une dimension éminemment politique que notre assemblée ne saurait ignorer.
Je reste malgré tout profondément confiante en la démocratie et en la justice. Nous avons tous ici été élus pour défendre les intérêts matériels et moraux du peuple corse et nous devons nous montrer dignes des responsabilités qu’il nous a confiées.
Per a Corsica è per u populu corsu è a so giuventù. A ringrazià vi ».